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L’enroulement liturgique du linceul des oubliés

Dominique Grandmont

Lettre à l'auteur du 15 décembre 1993

"Merci cher P.L. (mais ai-je bien le droit de vous abréger ainsi ?) pour cette résolument verlainienne pitié du monde qui nous enserre –goualante rauque dont – tout de même – la régularité des rafales agit comme une litanie protestataire, ou est-ce une mission de l’art que l’enroulement liturgique du linceul des oubliés… cet investissement de l’humilité nous emmène par le poignet dans un espace où l’envol humain semble pourtant possible, et la pierre fraternelle, et la présence –on ne sait pas de quoi – terrible. « La rumeur libre » de se perdre nous entraîne avec elle dans ce sentiment de présence (idée sans fin nouvelle de ce qui fait l’impénétrable de la vie), dans cette reconquête d’un vocabulaire meurtri, froid (comme ont froid les vaincus réels de cette guerre de simulacres). Vous nous rappelez à ce qui s’éteint (mais c’est une forme jumelle de l’émergence). Du côté du fou et de l’enfant mort, permettez-moi de dire que moi aussi je reste (comme cette silhouette de l’auteur des deux côtés de la vitre du regard) – et, même si c’est à travers (moi aussi) la fausse brutalité de phrases (mais pas en transparence) intactes ; - qu’il me semble entendre monter (et aussi se multiplier latéralement, pas retomber) cette parole, cette clameur d’un temps qui s’annonce encore fils de nos actions. Vous appelez cela l’air du temps ce qui est discrètement l’autre nom de la peau (bleuie par les coups non pas du sort, mais de la force vidée de sa force – je veux parler de la force vide qui nous reconduit au silence), et je vous remercie, si vous le voulez bien, d’y tatouer les nuages incertains du poème, anonyme et commun."